La vengeance des Africains

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En 1997, à Bangkok, dans le quartier de Banglumpoo, non loin de la célèbre Khao Sarn Road, lieu de rassemblement des voyageurs routards, se trouvait un petit Soi (ruelle en Thai) ou vivotaient à l'année de nombreux Africains, originaires surtout du Kenya et du Nigeria. La plupart d'entre eux se faisaient un bon pécule en vendant de l'héroïne aux touristes à 1000 baths le gramme. Il y avaient un accord entre eux et les flics Thais. Ils soudoyaient ces derniers pour avoir la paix. Certains d'entre eux n'hésitaient pas à se lancer dans de gros trafiques. Ceux là achetaient de l'héroïne en grande quantité, la revendaient en Amerique du Sud et ramenaient de là bas de la cocaïne qu'ils refourguaient en Asie. Mais la plupart n'étaient que de petits dealers. Peter le Kenyan était l'un d'entre eux.

Comme tous ses compatriotes, peter payait la police tous les mois. Mais malgré cela il gagnait bien sa vie. Achetant la poudre en gros à 600 baths le gramme, il la revendait 1000 après l'avoir coupée à 30 pour cent. Et il y avait beaucoup d'acheteurs parmi les touristes farangs (les blancs en Thai). Il vivait dans une guest house pourrie qui ne lui coûtait que 2500 baths par mois, avec une pute Thaïe accro à la blanche qui couchait avec lui en échange de sa dose.

Somkiat et Thongbai étaient tous les deux policiers. Il patrouillaient régulièrement dans le quartier à la recherche de drogue. Quant ils serraient un routard avec un peu d'herbe, il proposaient toujours à celui ci de payer 50 000 bath pour fermer les yeux. S'il refusait, il était bon pour le poste, suivit de la prison pour quelques mois et enfin de l'expulsion avec son nom noté sur la liste noire des étrangers indésirables en Thailande. Pour de l'héroïne ils demandaient beaucoup plus car la peine de prison était alors de plusieurs années. Des fois, quant ils avaient un besoin urgent d'argent, ils attendaient le milieu de la nuit car les témoins potentiels se faisaient rares, coinçaient un touriste noctambule qui souvent revenait de Pat Pong, sortaient la drogue de leur propre poche et le faisaient chanter :- Donnes nous 20 000 baths ou on raconte qu'on a trouvé ça sur toi. Quelques touristes refusaient de payer et dans ce cas les deux flics n'insistaient pas car ils craignaient les ennuis mais la plupart, terrorisés, raquaient.

Un soir, après avoir bu quelques bières, Somkiat et Thongbai se mirent en chasse. La veille ils avaient perdu beaucoup d'argent au jeu et ils voulaient se renflouer. Après avoir fouiner un peu partout aux alentours de Khao Sarn Road, les deux policiers tombèrent sur Peter qui revenait de chez son grossiste et qui avait une trentaine de gramme d'héroïne sur lui. Ils connaissaient bien l'Africain et s'ils n'avaient pas bu plus que de raison, ils lui auraient probablement foutu la paix vu que celui ci n'oubliait jamais de payer sa cotisation. Ils se dirigèrent vers lui.

- Oh Nikro (les noirs en Thai) ou vas tu comme ça? Arrêtes toi, tu m'as l'air pas net, on va te fouiller.
- Mais nous avons des accords.
- Rien à foutre des accords, ici c'est la Thailande et c'est nous qui faisons la loi, pas les gens comme toi, lui répondit Thongbai tandis que son collègue se mettait à le fouiller.
Peter, furieux, mit son poing dans le visage de Somkiat et pris ses jambes à son cou.

Quant il vit cela, le sang de Thongbai ne fit qu'un tour. Il sortit son revolver et vida son chargeur dans la direction du fuyard. Trois balles atteignirent leur but. Peter, touché à la jambe et au dos, s'écroula. Alors le policier se saisit de son talkie walkie et appela ses collègues.

Dix minutes plus tard ils rappliquèrent accompagnés d'une ambulance. Les infirmiers ramassèrent Peter, gravement blessé et Somkiat, qui était K.O. étendu par terre la gueule en sang. De retour au commissariat, Thongbai fut convoqué par le capitaine Pitawan.

- Raconte, lui demanda l'officier.
Le policier expliqua à son supérieur qu'il voulait plaisanter avec le noir mais que celui ci s'était énervé et avait agressé son collègue. C'était de la légitime défense.
- Nous te couvrirons mais tu as fait une erreur, lui répondit le capitaine. Il va falloir que j'arrange le coup avec les Africains.
Le lendemain, l'officier, accompagné de deux hommes, alla voir Michael, un Kenyan lui aussi, qui était un des chefs des Africains. Après lui avoir présenté ses excuses pour ce qui s'était passé, il lui dit que cette malheureuse histoire ne remettait pas en cause leurs accords. Le noir ne répondit rien.
Quelques jours plus tard, Peter décéda des suites de ses blessures. Le capitaine Pitawan fut félicité par ses supérieurs pour la mise hors d'état de nuire d'un dangereux trafiquant de drogue et pour la saisie de 30 grammes d'héroïne. Somkiat sortit de l'hôpital au bout de deux semaines. Le coup de poing de Peter lui avait fracturé la mâchoire. Il avait aussi perdu quelques dents.

Un mois après, le capitaine reçu un colis chez lui. Après l'avoir ouvert, il alla vomir dans les toilettes. A l'intérieur se trouvait la tête proprement découpée de Thongbai.

Par la suite, les policiers fichèrent une paix royale aux Africains, se contentant de toucher leurs commission. Ceux ci purent continuer tranquillement leur trafique jusqu'en 2006, date à laquelle de nouvelles lois, qui rendait le séjour à long terme des étrangers beaucoup plus difficile, furent mise en applications. La plupart des Africains émigrèrent alors au Cambodge, beaucoup plus libéral.
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